Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie : DORS/2024-254

La Gazette du Canada, Partie II, volume 158, numéro 26

Enregistrement
DORS/2024-254 Le 9 décembre 2024

LOI SUR LES MESURES ÉCONOMIQUES SPÉCIALES

C.P. 2024-1292 Le 9 décembre 2024

Attendu que la gouverneure en conseil juge que les actions de la Fédération de Russie constituent une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales qui a entraîné une grave crise internationale,

À ces causes, sur recommandation de la ministre des Affaires étrangères et en vertu de l’alinéa 4(1)a)référence a et des paragraphes 4(1.1)référence b, (2)référence c et (3) de la Loi sur les mesures économiques spéciales référence d, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie, ci-après.

Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie

Modification

1 La partie 1 de l’annexe 1 du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie référence 1 est modifiée par adjonction, selon l’ordre numérique, de ce qui suit :

Antériorité de la prise d’effet

2 Pour l’application de l’alinéa 11(2)a) de la Loi sur les textes réglementaires, le présent règlement prend effet avant sa publication dans la Gazette du Canada.

Entrée en vigueur

3 Le présent règlement entre en vigueur à la date de son enregistrement.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)

Enjeux

L’agression non provoquée et injustifiable de la Russie contre l’Ukraine viole le droit international, compromet la stabilité dans la région et met en péril d’innombrables vies innocentes. Elle menace également les valeurs et les principes qui sous-tendent le système international fondé sur des règles, y compris le droit de chaque État à la souveraineté et à l’autodétermination.

Les autorités russes et leurs collaborateurs locaux ont été impliqués dans un recours systématique et généralisé à la torture contre des prisonniers de guerre et des civils ukrainiens détenus dans les territoires ukrainiens temporairement occupés.

Contexte

Situation en Ukraine

Le 24 février 2022, la Russie a lancé une invasion militaire de l’Ukraine en menant des attaques contre de nombreuses villes. Depuis lors, la Russie a continué de mener une guerre d’agression et a commis des atrocités contre les Ukrainiens. Elle continue d’attaquer des cibles civiles telles que des infrastructures essentielles en Ukraine, entraînant la perte d’accès à l’eau, à l’électricité et aux communications, et de violer les principes de la Charte des Nations Unies.

Des experts, notamment des missions d’enquête du Mécanisme de Moscou de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, de la Commission internationale indépendante d’enquête sur l’Ukraine, et du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, ont conclu que la Russie commettait de graves violations des droits de la personne, des crimes de guerre, de possibles crimes contre l’humanité, et des actes de violence sexuelle liés au conflit. En octobre 2024, la Mission de surveillance des droits de l’homme en Ukraine a confirmé qu’au moins 12 162 civils avaient été tués et plus 26 000 blessés depuis le 24 février 2022. En outre, 662 établissements médicaux et 1 496 établissements d’enseignement en Ukraine ont été endommagés ou détruits par l’armée russe depuis l’invasion.

La Commission d’enquête internationale indépendante des Nations Unies sur l’Ukraine a constaté que les autorités russes ont utilisé la torture comme crime de guerre contre des civils et des prisonniers de guerre ukrainiens au cours de l’invasion massive de l’Ukraine. La Commission a conclu que la torture était répandue et systématique. Le recours à la torture par les autorités russes dans tous les territoires temporairement occupés de l’Ukraine a suivi un schéma similaire. Il s’agit notamment de pratiques de torture dans les centres de détention, de l’utilisation coordonnée de personnel de certains services de la Fédération de Russie (y compris des fonctionnaires des services pénitentiaires fédéraux et du service fédéral de sécurité, ainsi que des officiers des forces armées russes) et de l’utilisation récurrente de la violence sexuelle comme forme de torture dans presque tous les centres de détention. Ces conclusions ont été présentées à l’Assemblée générale des Nations Unies en octobre 2024.

Réponse internationale

La coalition des pays qui soutiennent directement l’Ukraine comprend, sans s’y limiter, les pays du G7 et les pays européens. Ce groupe travaille à soutenir l’Ukraine dans plusieurs domaines, notamment la sécurité énergétique, la sûreté nucléaire, la sécurité alimentaire, l’aide humanitaire, la lutte contre la désinformation russe, l’imposition de sanctions et de mesures économiques, la saisie et la confiscation d’actifs, la fourniture d’assistance militaire, la reddition de comptes, le rétablissement socioéconomique et la reconstruction.

Réponse du Canada

Le Canada condamne sans équivoque les actions illégales et inqualifiables de la Russie. À la suite de l’occupation illégale et de la tentative d’annexion de la Crimée par la Russie en mars 2014, le gouvernement du Canada, de concert avec des pays ayant une optique commune, a adopté des sanctions au titre de règlements pris en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales (LMES). Ces sanctions imposent des interdictions de transactions (un gel effectif des avoirs) aux personnes et aux entités énumérées qui soutiennent ou permettent la violation de la souveraineté de l’Ukraine par la Russie. Il est interdit à toute personne au Canada et aux Canadiens à l’étranger d’effectuer des opérations sur les biens des personnes figurant aux annexes 1, 2 ou 3 du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie (le Règlement).

Depuis 2014, en coordination avec ses partenaires, le Canada a imposé des sanctions à plus de 3 000 personnes et entités en Russie, au Bélarus, en Ukraine et en Moldavie. En outre, le Canada a mis en place des restrictions ciblées contre la Russie et le Bélarus dans les secteurs de la finance, du commerce (biens et services), de l’énergie et des transports. Le Canada participe à la Coalition pour le plafonnement des prix du pétrole, à l’interdiction d’importer des diamants imposée par le G7 et aux efforts déployés pour utiliser le produit des actifs souverains russes afin d’aider l’Ukraine.

Le Canada demeure inébranlable dans son engagement à soutenir la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance de l’Ukraine et les efforts que déploie le pays pour l’instauration d’une paix juste et durable. Au total, le Canada a versé plus de 19,5 milliards de dollars en aide financière, militaire, humanitaire, au développement, à la sécurité, à la stabilisation ainsi qu’en matière d’immigration en réponse à l’invasion à grande échelle par la Russie le 24 février 2022. L’engagement du Canada à soutenir la stabilité, la sécurité et la souveraineté de l’Ukraine demeure infléchi, alors que l’Ukraine continue de résister à la guerre d’agression de la Russie.

De plus, le Canada continue de déployer des efforts considérables pour sensibiliser la population et défendre les intérêts des Ukrainiens détenus et expulsés illégalement, un problème crucial qui remonte à l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2014 et qui a été exacerbé depuis le lancement de la guerre d’agression à grande échelle de la Russie en 2022. Les 30 et 31 octobre 2024, le Canada a coorganisé la Conférence ministérielle sur la dimension humaine du plan de paix en 10 points de l’Ukraine (une formule qui respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays, la Charte des Nations Unies et le droit international) à Montréal avec les ministres des Affaires étrangères de l’Ukraine et de la Norvège. Lors de la conférence, les ministres ont annoncé l’Engagement de Montréalréférence 2— des mesures concrètes pour aider au retour des prisonniers de guerre, des civils détenus illégalement et des enfants déportés, y compris un soutien à la réintégration de ces personnes dans leur vie quotidienne.

Objectif

Les objectifs de l’imposition de sanctions sont les suivants :

Description

Les modifications ajoutent à l’annexe 1 du Règlement neuf personnes qui ont été impliquées dans la violation des droits de la personne lors de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie, notamment en torturant des prisonniers de guerre et des civils détenus dans des centres de détention dans des territoires temporairement occupés.

Ces personnes comprennent des fonctionnaires russes des services pénitentiaires fédéraux, du service fédéral de sécurité et de la garde nationale russe (Rosgvardia). Il s’agit également de ressortissants ukrainiens qui ont collaboré avec les forces d’occupation russes depuis l’invasion. Leur participation à des actes de torture contre des civils et des prisonniers de guerre ukrainiens est bien documentée.

Il est donc interdit à toute personne au Canada ou à tout Canadien à l’étranger, à l’égard d’une personne désignée, d’effectuer une transaction portant sur un bien lui appartenant, de conclure une transaction avec elle, de lui fournir des services, de lui transférer des biens ou par ailleurs de mettre des biens à sa disposition — à moins qu’un permis ne l’autorise explicitement, lequel est accordé à titre exceptionnel, ou qu’il ne s’agisse d’une exception prévue par le Règlement. Ces mesures rendront également les personnes inscrites interdites de territoire au Canada en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. En vertu du Règlement, les personnes inscrites sur la liste peuvent demander à la ministre des Affaires étrangères de retirer leur nom de l’annexe. La ministre doit décider s’il existe des motifs raisonnables de recommander le retrait au gouverneur en conseil.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Affaires mondiales Canada s’entretient régulièrement avec les intervenants concernés, dont des organisations de la société civile, des communautés culturelles, ainsi qu’avec d’autres gouvernements ayant une optique commune, au sujet de l’approche du Canada en matière de mise en œuvre des sanctions.

Pour ce qui est des modifications ajoutant des particuliers aux annexes, il n’est pas approprié de mener des consultations publiques. La publication du nom des personnes à ajouter à la liste pourrait entraîner la fuite de biens avant l’entrée en vigueur des modifications.

Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones

Une première évaluation de la portée géographique de l’initiative a été effectuée et n’a pas permis de déterminer d’obligations découlant de traités modernes, puisque les modifications ne prennent pas effet dans une zone de traité moderne.

Choix de l’instrument

Les règlements constituent la seule méthode pour promulguer des sanctions au Canada. Aucun autre instrument ne pourrait être pris en compte.

Analyse de la réglementation

Avantages et coûts

Le coût supplémentaire pour le gouvernement du Canada de l’administration et de l’application de ces interdictions supplémentaires est minime.

Les sanctions visant des entités et des particuliers précis ont en outre moins d’incidence sur les entreprises canadiennes que les sanctions économiques habituelles à grande échelle et ont un effet limité sur les citoyens du pays des entités et particuliers visés. D’après une évaluation initiale des renseignements disponibles de source ouverte, il y a lieu de croire que les personnes inscrites sur la liste n’ont pas de lien avec le Canada et n’ont donc pas d’activités commerciales importantes qui sont pertinentes pour l’économie canadienne. Ces modifications ne devraient donc pas avoir d’incidence importante sur les Canadiens et les entreprises canadiennes.

Les banques et institutions financières canadiennes sont tenues de respecter les sanctions. Elles le feront en ajoutant les noms des nouvelles personnes désignées à leurs systèmes de surveillance existants, ce qui pourrait entraîner un coût de conformité mineur.

Lentille des petites entreprises

L’analyse sous la lentille des petites entreprises conclut que les modifications n’entraîneront pas de nouveau fardeau en matière d’administration ou de conformité pour les petites entreprises au Canada. Les modifications interdisent aux entreprises canadiennes de traiter avec les personnes inscrites sur la liste, de leur fournir des services ou de mettre des biens à leur disposition, mais ne créent pas d’obligations à leur égard. En outre, les entreprises canadiennes peuvent demander des permis en vertu du Règlement, lesquels sont accordés à titre exceptionnel, ce qui laisse une marge de manœuvre pour les exemptions. Toutefois, Affaires mondiales Canada ne prévoit aucune demande découlant de l’inscription de ces personnes sur la liste. Les petites entreprises canadiennes sont également soumises à l’obligation de divulgation en vertu du Règlement, ce qui représenterait une exigence de conformité directe. Cependant, les personnes nouvellement inscrites n’ont aucun lien légitime connu avec le Canada. Affaires mondiales Canada ne prévoit donc aucune divulgation résultant de ces modifications.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas aux modifications apportées, car celles-ci n’imposent aucun fardeau administratif supplémentaire. La procédure de délivrance de permis pour les entreprises répond à la définition de « fardeau administratif » de la Loi sur la réduction de la paperasse; cependant, bien que des permis puissent être accordés à titre exceptionnel en vertu du Règlement, étant donné que les particuliers figurant sur la liste n’ont pas de lien d’affaires connu avec l’économie canadienne, et étant donné le faible volume d’échanges commerciaux avec la Russie, Affaires mondiales Canada ne prévoit aucune demande de permis en ce qui concerne les modifications.

Coopération et harmonisation en matière de réglementation

Bien que les modifications ne soient pas liées à un plan de travail ou à un engagement dans le cadre d’un forum officiel de coopération réglementaire, elles s’alignent sur les mesures prises par des partenaires du Canada et des partenaires ayant une optique commune. Les sanctions sont plus efficaces lorsqu’elles sont appliquées de façon coordonnée, et le Canada s’emploie à harmoniser ses efforts en interne et avec ses partenaires afin de présenter un front uni en matière de sanctions.

Les partenaires internationaux du Canada continuent d’actualiser leurs régimes de sanctions contre les personnes et les entités en Russie et d’imposer à la Russie des interdictions de grande portée en matière de financement, de commerce et d’investissement. Les pays et administrations qui ont sanctionné des personnes et des entités en rapport avec les violations flagrantes et systématiques des droits de la personne par la Russie sont l’Australie, les États-Unis, le Japon, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni, la Suisse et l’Union européenne.

Effets sur l’environnement

Il est peu probable que les modifications entraînent des effets importants sur l’environnement. Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale et économique stratégique (EEES), une analyse préliminaire a conclu qu’une EEES n’est pas nécessaire.

Analyse comparative entre les sexes plus

Même si elles visent à favoriser un changement de comportement en exerçant une pression économique sur des individus dans des États étrangers, les sanctions appliquées en vertu de la LMES peuvent néanmoins avoir des effets non voulus sur certains groupes et certaines personnes vulnérables. Au lieu de s’appliquer à la Russie dans son ensemble, ces sanctions ciblées toucheront des personnes soupçonnées de mener des activités qui soutiennent, facilitent ou financent, directement ou indirectement, une violation de la souveraineté ou de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, ou y contribuent. Par conséquent, il est peu probable que ces sanctions aient des effets importants sur des groupes vulnérables comparativement aux sanctions économiques habituelles appliquées de manière générale envers un État. Dans la mesure où les sanctions limitent la capacité de la Russie à faire la guerre, les femmes, les enfants et les groupes vulnérables sont susceptibles de bénéficier de ces mesures.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Les modifications entrent en vigueur à la date de leur enregistrement.

Du fait de leur inscription en vertu du Règlement, et conformément à l’alinéa 35.1b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, les particuliers désignés seraient interdits de territoire au Canada.

Les noms des particuliers inscrits seront accessibles en ligne pour que les institutions financières puissent en prendre connaissance et seront ajoutés à la Liste consolidée des sanctions autonomes canadiennes. Cette mesure contribuera à faciliter le respect du Règlement.

Le Service des délégués commerciaux d’Affaires mondiales Canada, à l’étranger et au Canada, continue d’aider les clients à comprendre la réglementation canadienne en matière de sanctions, et notamment l’incidence de cette réglementation sur toute activité à laquelle des Canadiens pourraient prendre part. Affaires mondiales Canada intensifie également ses efforts de sensibilisation dans tout le Canada, notamment auprès des entreprises, des universités et des gouvernements provinciaux et territoriaux, afin d’améliorer à l’échelle nationale la connaissance et le respect des sanctions canadiennes.

Au titre de la LMES, les agents de la Gendarmerie royale du Canada et de l’Agence des services frontaliers du Canada peuvent imposer des sanctions en vertu des pouvoirs qui leur sont conférés par la Loi sur les douanes, la Loi sur l’accise ou la Loi de 2001 sur l’accise, ainsi que par les articles 487 à 490, 491.1 et 491.2 du Code criminel.

Conformément à l’article 8 de la LMES, quiconque contrevient volontairement au Règlement ou omet de s’y conformer encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de 25 000 $ et un emprisonnement maximal d’un an, ou l’une de ces peines, ou, par mise en accusation, un emprisonnement maximal de cinq ans.

Personne-ressource

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